Marseille : Le boulanger Pierre Ragot innove avec son moulin à Endoume, qui fabrique la farine du jour avec du blé local

Boulanger bio et précurseur du bon pain à Marseille, Pierre Ragot a monté son propre moulin pour travailler une farine au meilleur de ses qualités nutritives et aromatiques.Le moulin, à meules de granit, est visible depuis la rue, à côté de la boutique Maison Saint-Honoré d’Endoume.Le blé provient de Saint-Rémy-de-Provence, de parcelles cultivées par un paysan militant des variétés anciennes.

Les nuits courtes ne semblent pas entamer la belle énergie de Pierre Ragot. Celui à qui l’on doit d’avoir redonné à Marseille le goût du bon pain, avant la vogue des néo-boulangers, poursuit l’aventure avec dorénavant son moulin. Depuis cet été, il jouxte la boutique Maison Saint-Honoré d’Endoume, l’une de ses trois adresses marseillaises, ouverte en 2014. Et lui fournit chaque jour en farine bio et locale, à quelques pas à peine du fournil. « Cela nous permet de travailler de la mouture fraîche, sourit Pierre Ragot. Nous travaillons toute la quintessence de la farine. »

Plus de temps de transport, la farine conserve toutes ses qualités nutritionnelles et aromatiques. « On respecte la matière première car on ne la chauffe pas », précise aussi le boulanger. Il a opté pour un moulin doté de meules en granit, qui n’écrase pas le grain de blé mais le « déroule ». « Je reçois chaque semaine 900 kg de grains, qui vont devenir 700 kg de farine, avec on fait tous nos pains spéciaux », ajoute Pierre Ragot, qui ne cache pas qu’il a fallu apprendre à maîtriser cette matière ô combien vivante : « A l’œil, on ne verra pas la différence, mais votre corps oui. »

Du blé cultivé près de Saint-Rémy-de-Provence

Le blé provient de parcelles cultivées sans aucuns intrants (même pas d’eau) à Maillane, près de Saint-Rémy-de-Provence. Ces terres sont celles d’Henri de Pazzis, « un personnage extraordinaire, un paysan, un philosophe » selon Pierre Ragot, qui ne tarit pas d’éloges à son propos. Ensemble, ils se passionnent pour les variétés anciennes, qu’elles soient mono variétales ou dites de population. « Ce ne sont pas des blés de catalogue, assujettis à l’industrie semencière, explique le boulanger marseillais. Ce sont des variétés qui ont été abandonnées au milieu des années 1950 en raison de leur rendement faible, dû à leurs pailles hautes. »

De leur rencontre est née l’idée du moulin, et aussi une nouvelle boulangerie à Saint-Rémy-de-Provence, baptisée « Terre et Blé ». « On travaille en direct avec le paysan, sans passer par une coopérative et sur des terres qui sont à une heure de voiture, poursuit Pierre Ragot. Je peux y aller quand je veux, pour les moissons, les semences. En comprenant mieux la terre, on comprend mieux notre pain. Le fait que le paysan puisse travailler de la main à la main avec le boulanger, cela va changer le pain. »

A la recherche du pain au levain idéal

Visible depuis la rue, le moulin est aussi l’occasion de faire de la pédagogie auprès du client. Il est ouvert à la visite plusieurs dimanches matins dans le mois. Certains remarqueront peut-être la discrète plaque « Panadero Clandestino » apposée sur le moulin. Un hommage au nom du fournil-atelier de Thierry Delabre, star des réseaux et du pain vivant décédé l’an passé, que le boulanger marseillais considère comme son mentor.

Car s’il est tombé dans la boulangerie dès l’âge de 15 ans, en découvrant un fournil au petit matin d’un retour de fête, Pierre Ragot se définit comme « un autodidacte de la fermentation ». Autrement dit, il s’est mis de lui-même en quête du bon pain, depuis le fournil des Auffes, sa première boutique à Marseille avant Maison Saint-Honoré (du nom du saint patron des boulangers). Et la rencontre avec Thierry Delabre fut déterminante.

« C’était l’aventure folle, pendant deux ans, lui à Paris, moi à Marseille, on a travaillé sur le levain idéal, on s’envoyait des souches par la Poste, rembobine Pierre Ragot. On en a jeté des fournées entières ! » Avant de trouver le « pain de ses rêves » : un pain bien alvéolé, avec une belle fermentation à l’intérieur, un toucher fondant sur la mie, un goût de levain mais qui n’est pas acide… A présent, le boulanger rêve d’un conservatoire de semences de blés, « pour échanger avec les paysans du monde entier et travailler sur les variétés. » Bref, il n’en a pas fini avec le pain.

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